La « paix » et la politique de non-agression en Afrique Centrale
Après la chute du mur de Berlin, il est de rigueur d’admettre aujourd’hui que la gestion des contraintes dans le cadre de la guerre froide n’a pas été une tâche aisée. Jusqu’à présent, l’objectif des Grandes Puissances était de garantir leurs propres acquisitions territoriales en termes d’idéologie politique, même au prix de la militarisation des régimes politiques qu’elles soutenaient, et de passer à la confrontation militaire, là où cela était possible, à travers les guerres civiles et les guerres de libération.
Dans ce contexte difficile, qui a coûté un nombre important de vies humaines, Juvénal Habyarimana a fait un choix qui n’a pas toujours été bien accueilli à l’étranger : celui d’une faible militarisation de son pays. Comme indiqué précédemment dans la section consacrée à la politique étrangère, l’objectif principal du Rwanda sous la présidence de Juvénal Habyarimana était de favoriser le développement social et économique de son pays.
Outre les contraintes liées à la confrontation entre les blocs idéologiques, il devait faire face à d’autres défis. Le Rwanda, enclavé et en quête d’énergie pour garantir son développement économique, devait entretenir de bonnes relations avec ses voisins. En résumé, Juvénal Habyarimana a doté le Rwanda d’une armée au service du pays, suspendant l’application de la peine de mort.
Voici quelques décisions stratégiques de Juvénal Habyarimana dans le domaine militaire qui ont eu des effets positifs sur le développement économique :
- Le faible nombre de militaires par rapport à la population totale (en 1990, sur une population de 6 500 000 habitants, l’effectif militaire atteignait près de 6 000 hommes) ;
- Les militaires résidaient dans les casernes et non parmi la population, comme c’était le cas dans la plupart des pays africains de l’époque ;
- Les militaires participaient aux travaux communautaires de développement, notamment dans le domaine des infrastructures, ce qui a permis d’économiser des sommes considérables sur les financements destinés à la réalisation des infrastructures publiques.
Avec un effectif militaire limité, le Rwanda de Juvénal Habyarimana a envoyé un message clair à ses voisins : « Nous n’avons aucune intention belliqueuse envers qui que ce soit ». Ce message a été compris, et tandis que les pays voisins alimentaient et armaient des armées importantes, le Rwanda s’engageait sans peur sur la voie du développement économique et social.
La politique de défense, de sécurité intérieure et extérieure de Juvénal a été fortement critiquée. Les critiques estiment que les choix de Juvénal Habyarimana en matière de politique de défense, de sécurité intérieure et extérieure étaient dus à son « incapacité », notamment en raison de l’agression du FPR à partir de l’Ouganda le 1er octobre 1990.
Il est important de comprendre, surtout pour les générations futures, que cette politique a été un choix intelligent et qu’elle n’a pas été la cause mais plutôt un frein à la violence. De 1973 à l’avènement du multipartisme en 1991, la plupart des enfants rwandais ont grandi sans jamais entendre de coups de feu, fréquentent l’école et voient des militaires creuser des fossés pour les lignes téléphoniques plutôt que de les recruter pour faire la guerre.
Personne ne peut affirmer que le comportement non agressif envers les voisins soit une erreur politique. Malheureusement, Juvénal Habyarimana est encore jugé ainsi. Les services de renseignements militaires ont une faible action au niveau national, laissant les populations civiles pratiquer la multi-culture dans leurs champs, faire du commerce ou de l’artisanat.
Les services de renseignements militaires ont une faible action au niveau international pour ne pas attirer les suspicions des voisins, ce qui pourrait entraîner une augmentation des effectifs militaires et avoir des conséquences négatives sur le développement économique.
Si le comportement non agressif envers les pays voisins et le développement économique comme objectif principal de l’organisation économique et sociale d’un pays ne sont pas considérés comme des erreurs politiques dans le monde entier, ils ne devraient pas l’être pour le Rwanda, et encore moins pour Juvénal Habyarimana, un militaire qui a choisi la paix.
Le paradoxe qui s’est dressé contre la mémoire de Juvénal Habyarimana est que le monde a fini par glorifier les politiciens et les militaires qui ont recours à l’agression militaire contre leurs voisins, tandis qu’il diabolise un militaire africain qui refuse la guerre comme moyen de résoudre les différends.